Des formes liées, des récits suspendus
À travers la collection Tissus de porcelaine, Sophie Manessiez aborde l’interconnexion et le concept d’insociable sociabilité, explorant la manière dont nous sommes à la fois définis par nos liens aux autres et aux éléments, tout en cherchant la liberté dans notre unicité. L’artiste explore les tensions entre uniformité et dissemblance, conformité et singularité. À travers ces dichotomies, elle cherche à mettre en lumière la manière dont l’individualité et la fragilité du vivant se manifestent, se lient et s’entrelacent pour former des réseaux de résilience et de force collective.
Présentées à Révélations, les tissages de porcelaine incarnent cette recherche sensible autour du lien, de la mémoire et de l’interdépendance. Chacun propose une variation plastique sur les notions de trace, de transformation et de fragilité du vivant. Ensemble, ils forment une œuvre chorale où le lien devient motif, et la répétition, langage. Un hommage à la diversité contenue dans l’uniforme, à la poésie fragile de ce qui tient, grâce aux autres.
Sophie Manessiez est une céramiste française installée au Canada depuis 2010. Elle a découvert sa passion pour la céramique il y a plus de 20 ans. Ses œuvres sont régulièrement exposées au Canada, aux États-Unis et en France.

Toute la dentelle du monde
2025 – Porcelaine
190 x 200 cm
Toute la dentelle du monde tisse une réflexion sur les liens invisibles qui maintiennent le vivant. Des milliers de pastilles de porcelaine façonnées à la main, reliées par un fil discret, composent une structure délicate où chaque élément dépend des autres. Le motif central, constitué de pastilles texturées de dentelle, fait émerger un cercle : cœur fragile d’un équilibre collectif.
L’œuvre interroge ce qui qui relie, ce qui tient un ensemble : ces liens infimes, souvent invisibles, qui, s’ils venaient à rompre, feraient s’effondrer l’équilibre. C’est une dentelle suspendue, une structure vibrante, où se révèle la poésie de l’interdépendance. Elle rend sensible cette trame du monde — faite de connexions fragiles, d’interdépendances muettes — qui soutient le collectif, dans toute sa vulnérabilité et sa beauté.

Chronolithique
2025 – Grès, porcelaine, fil
30 x 200 cm
Dans Chronolithique, l’artiste tisse un dialogue sensible entre matière et mémoire. En juxtaposant 660 pastilles de grès et de porcelaine en strates verticales, elle recompose une carotte géologique fictive, à la fois archive du temps et métaphore de l’identité du présent. Cette œuvre interroge la trace et les liens que nous laissons dans l’épaisseur du monde. Suspendue par un fil, Chronolithique invite à une méditation sur la mémoire et la brièveté des matières de l’existence du vivant, face à l’immensité géologique.
Le terme Chronolithique est une combinaison de deux mots : “chrono” (du grec chronos, qui signifie “temps”) et “lithique” (du grec lithos, qui signifie “pierre”). Littéralement, Chronolithique désigne quelque chose qui est à la fois lié au temps et à la pierre, comme un marqueur temporel, une “pierre du temps”.

Calciflore
2025 – Porcelaine et fils
30 x 200 cm
Avec Calciflore, l’artiste compose une topographie intime où la matière devient mémoire.
Façonnées en porcelaine et teintées de rutile, 660 pastilles reliées par un fil tracent une transition subtile du sable au silence, du beige profond à la lumière. Ce tissage évoque à la fois l’extraction et la transformation : un fragment de rivage intérieur, né du souvenir et poli par le temps.
L’œuvre interroge la perception, la lente métamorphose des émotions enfouies, la façon dont le passé s’imprime dans les détails de la matière.

Xylocide
2025 – Porcelaine colorée, etfil
30 x 200 cm
Composée de 660 pastilles de porcelaine reliées par un fil noir, Xylocide déploie un dégradé de couleurs du vert profond au blanc. Cette transition lente et précise, du vivant vers le vide, évoque la disparition des forêts, ravagées par les feux, notamment ceux de l’été 2023 au Canada. Le vert s’éteint dans les teintes cendreuses, jusqu’à un blanc final, synonyme de silence, d’absence. Cette verticalité chromatique est un mémorial fragile et suspendu, une méditation sur la beauté détruite et la trace des éléments de ce qui fut vivant.

Fil doré
2023 – Porcelaine et fil
64 x 45 cm – Encadré

Fil jaune
2023 – Porcelaine et fils
30 x 30 cm – Encadré

Fil orange
2023 – Porcelaine et fils
30 x 30 cm – Encadré
Cette série de trois œuvres encadrées explore la trame invisible des liens familiaux et des souvenirs d’enfance. Chaque pièce se compose d’éléments de porcelaine reliés par un fil délicat, métaphore des connexions qui subsistent malgré le temps et la distance. Le fil doré incarne la précieuse fragilité des relations familiales, tandis que les fils orange fluo et jaune fluo rappellent les éclats vifs et insouciants des années 80, époque où se tissent les premières attaches. Inspirée par l’expérience du deuil et réalisée dans le sillage de la pandémie, la série rend hommage à ces liens qui perdurent, parfois distendus mais jamais rompus. Chaque jonction devient un point de mémoire, chaque fil un rappel de la force de nos attaches, à la fois éphémères et indélébiles.
Oeuvres présentées à la Biennale Révélations avec le soutien du CALQ
